Moi qu'un petit enfant rend tout à fait stupide,
J'en ai deux ; George et Jeanne ; et je prends l'un pour guide
Et l'autre pour lumière, et j'accours à leur voix,
Vu que George a deux ans et que Jeanne a dix mois.
Leurs essais d'exister sont divinement gauches ;
On croit, dans leur parole où tremblent des ébauches,
Voir un reste de ciel qui se dissipe et fuit ;
Et moi qui suis le soir, et moi qui suis la nuit,
Moi dont le destin pâle et froid se décolore,
J'ai l'attendrissement de dire : Ils sont l'aurore.
Leur dialogue obscur m'ouvre des horizons ;
Ils s'entendent entr'eux, se donnent leurs raisons.
Jugez comme cela disperse mes pensées.
En moi, désirs, projets, les choses insensées,
Les choses sages, tout, à leur tendre lueur,
Tombe, et je ne suis plus qu'un bonhomme rêveur.
L'art d'être grand-père
publié en 1877

Caïn, ayant tué son frère Abel, voit un oeil qui le regarde...
il change de lieu, ses enfants mettent des toiles ou des murs devant ses yeux, mais cela n'y change rien :
"Cet oeil le regarde toujours"...
Pour échapper à ce regard de sa propre conscience, il veut se cacher sous la terre, mais
"L'oeil était dans la tombe et regardait Caïn",
fin du grand poème
"La conscience"
de
"La légende des siècles".